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mercredi 17 juillet 2019

Ouizzzzzzzzzzzz

J'atteignais seize ans. Une timidité excessive m'était venue de cette aptitude à souffrir de tout. Me sentant découvert contre toutes les attaques du hasard ou de la destinée, je redoutais tous les contacts, toutes les approches, tous les évènements. Je vivais en éveil comme sous la menace constante d'un malheur inconnu et toujours attendu. Je n'osais ni parler, ni agir en public. J'avais bien cette sensation que la vie est une bataille, une lutte effroyable où on reçoit des coups épouvantables, des blessures douloureuses, mortelles. Au lieu de nourrir, comme tous les hommes, l'espérance heureuse du lendemain, j'en gardais seulement la crainte confuse et je sentais en moi une envie de me cacher, d'éviter ce combat où je serais vaincu et tué.
......
je commençai à voir clair en moi. Je compris pourquoi toutes les petites misères de chaque jour prenaient à mes yeux une importance de catastrophe; je m'aperçus que j'étais organisé pour souffrir affreusement de tout, pour percevoir, multipliés par ma sensibilité malade, toutes les impressions douloureuses, et une peur atroce de la vie me saisit. J'étais sans passions, sans ambitions; je me décidai à sacrifier les joies possibles pour éviter les douleurs certaines....
Après, Maupassant

dimanche 9 juin 2019

Kliiiiiiiiiiiiiiche

mais brusquement je me rappelai la théorie d'un médecin de mes amis, un médecin observateur et philosophe qu'un service constant dans un grand hôpital met en rapport quotidien avec des filles-mères et des filles publiques, avec toutes les hontes et toutes les misères des femmes, des pauvres femmes devenues la proie affreuse du mâle errant avec de l'argent dans sa poche.
"Toujours, me disait-il, toujours une fille est débauchée par un homme de sa classe et de sa condition. J'ai des volumes d'observations là-dessus. On accuse les riches de cueillir la fleur d'innocence des enfants du peuple. Ca n'est pas vrai. Les riches payent le bouquet cueilli ! Ils en cueillent aussi, mais sur les secondes floraisons; ils ne les coupent jamais sur la première ."
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dans un dîner des Spartiates, en 1871, on s'élevait contre l'idée reçue que les filles du peuple sont déflorées par les bourgeois "tandis qu'en réalité le déshonneur commence presque toujours par les cousins ou par les frères" - Journal de Goncourt, 21 novembre, II)
L'armoire, Maupassant

mercredi 11 juillet 2018

Tsss ! tsssss ! tsssssssssssssss !

....l'homme qui escorte une jolie femme se croit toujours coiffé d'une auréole; à plus forte raisson celui qui passent entre deux jolies femmes. Rien ne plait autant que de dîner dans un restaurant bien fréquenté, avec une amie que tout le monde regarde; et rien d'ailleurs n'est plus propre à poser un homme dans l'estime de ses voisins.

Aller au Bois traîné par une rosse, ou sortir sur le boulevard, escorté par un laideron, sont les deux accidents les plus humiliants qui puissent frapper un coeur délicat préoccupé de l'opinion des autres. De tous les luxes, la femme est le plus rare et le plus distingué, elle est celui qui coûte le plus cher et qu'on nous envie le plus; elle est donc aussi celui que nous devons aimer le mieux à étaler sous les yeux jaloux du public.
Montrer au monde une jolie femme à son bras, c'est exciter, d'un seul coup toutes les jalousies; c'est dire:"voyez, je suis riche,puisque je possède cet objet rare et coûteux; j'ai du goût, puisque j'ai su trouver cette perle; peut-être en suis-je aimé, à moins que je ne sois trompé par elle, ce qui prouverait encore que d'autres aussi la jugent charmante."

Mais quelle honte que de promener par la ville une femme laide ! Que de choses humiliantes cela laisse entendre ! En principe, on la suppose votre femme légitime, car comment admettre qu'on possède une vilaine maîtresse ? Une vraie femme peut être disgracieuse, mais sa laideur signifie alors mille choses désagréables pour vous....
Maupassant, Mes vingt-cinq jours