- La péremption de Nicolas Fargues... Une femme de 50 ans, blanche, lui jeune Congolais...
- Kannjawou de Lyonel Trouillot...que j'ai arrêté à la page 5...malgre 3 essais pour aller plus loin... incapable, d'encaisser une énième histoire de noirs dans la misère... Just give me a break..... son style n'est pas repoussant, mais non.
*************
p. 110 : T'as dit quoi là ? Il se dressait face à deux types que nous venions manifestement de croiser. Attends t'as dit quoi là ? Le plus grand des deux haussait les sourcils qui feignaient la surprise avec morgue. Hein ? Quoi ? Y'a quoi ? T'as un problème ? Son visage osseux me faisait penser à la gueule d'un lévrier hongrois. J'avais raté quelque chose mais quoi ? Schock et le type se connaissaient-ils ? Avaient-ils ensemble semble un vieux contentieux à régler ?....... Bâtard, va, niqueur de pastèque. J'ai pas signé comme toi un cdi avec la loose. Allez casse-toi, salope, va manger tes morts..... Les deux types s'étaient suffisamment éloignés. T'as entendu ce qu'il a dit ? T'as pas entendu quand ce fils de pute il a dit karlouche ? Il faisait genre je parle à l'autre mais c'était pour moi................Il n'avait fait que défendre sa dignité en somme. Et la mienne par la même occasion, puisque ce karlouche avait dû être proféré en allusion au couple que nous formions lui et moi: un jeune noir servile enlacant par la taille une vieille blanche lubrique. Aucune raison pour eux de balancer un mot pareil à Schock si je n'avais figuré à ses côtés. Et il avait employé face à des chiens le seul ton requis pour cela : un ton de chien.
p. 138 : la cohue à l'aéroport de Goma, l'attente, la papasserie administrative, les ventilateurs hors d'usage. Les agents d'immigration dans leurs guérites en bois scrutant tes documents de voyage et tes tests covid dans l'espoir d'y trouver la faille qui te fera allonger quelques billets. Tout un simulacre d'intimidations avant de te laisser passer enfin.
p.171 : Com m'avait prévenu : le Rwanda, tu verras ça n'a rien à voir. En effet. Malgré mon esprit occupé à ne pas laisser la peine y prendre trop de place, je ne pouvais que constater le contraste : chaussées asphaltees et marquées, bord de route plantés de massifs fleuris, façades et vitrages entretenues, piétons au pas sur des trottoirs, conducteurs et passagers casques sur des taxis-motos. Pas de détritus ni de vendeurs ambulants. Rien de guingois ou de rafistolé nulle part. De la pauvreté oui mais de l'ordre d'abord. Le paradoxe, c'est ce que ce pays qui nous accueillait était suspecté par tout le monde d'être à la manœuvre dans l'attaque de Bukavu........... sur les bancs de cette salle où nous attendions le Bombardier qui nous mènerait jusqu'à Kigali, deuxième étape de notre rapatriement vers l'Europe. Et moi, je pensais que je me sentais en sécurité dans cet aéroport où le wifi était gratuit, où nul ne cherchait à me soutirer quelques dollars et dans les toilettes duquel le sèche-mains automatiques fonctionnait à merveille.
p. 148 : j'ai préféré prétexter mon embarras à continuer de partager avec lui un lit dans la promiscuité immédiate de sa mère et de ses frères et sœurs plutôt que dans les deux heures d'électricité par jour attribuées au quartier par la régie locale, des environs trop inhospitalieres pour une balade innocente, l'insuffisante épaisseur de notre matelas en mousse, la moustiquaire mitee, les brocs d'eau trop profonde pour la toilette quotidienne et l'odeur des feuilles de manioc mises à bouillir dans la marmite dès 5 heures du matin par Philomene et Espérance....................... Nous avons pris un taxi pour nous rendre dans une institution hôtelière, chère mais satisfaisante. Avec clôture et sentinelles, salle à manger ouverte avec panorama sur le lac, menu gastronomique, cheminée rustique pour les soirées fraîches, kayaks à louer, jardin profonds et sarclé, wifi, eau chaude, électricité à volonté.
p. 162 : je m'en voulais de ne pas faire l'effort de comprendre, car je refusais de croire que la situation se résumait à un schéma trop simpliste : des escouades opportunistes et sanguinaires commandités par des états voisins et qui sous couvert de patriotisme cherchaient à contrôler des territoires dont les ressources naturelles étaient grassement monayables auprès de multinationales occidentales.
p. 166 : Un blanc s'adressait à un couple de Blancs... C'était le consul honoraire de France à Bukavu. On oui avait signalé que des compatriotes sejournaient à l'hôtel, la situation était jugée assez préoccupante depuis Kinshasa, à l'ambassade pour qu'il soit chargé de préparer une évacuation en coordination avec la Monusco, la force locale...... Il avait beau représenter une communauté étrangère de moins de 10 individus dans cette ville qui comptait plus d'un million d'habitants, il occupait l'espace avec l'autorité d'un notable local de haut rang. Le petit personnel congolais de l'hôtel qui assistait à la scène balai en main en paraissait réduit à une brigade ouvriers en situation irrégulière. C'était cela un pays puissant, un pays riche, un pays sérieux : parvenir à faire tourner partout dans le monde autour de soi. Assurer la sécurité de ses ressortissants jusque dans des zones situées aux antipodes de leurs propres valeurs.
p. 168 : Romain et Julie, le couple de Blancs, n'en était pas un. Il s'agissait de deux collègues en mission pour une Ong rennaise, disposant de deux chambres distinctes à l'hôtel.... je visualisais ces jeunes partager le soir, à la seule lueur d'un brasero, la mangeaille des villageois sans jamais omettre de complimenter les cuisinières avant d'aller s'étendre sur des nattes déroulées à même le sol. Expédier une toilette intime le lendemain matin avec cinquante centilitres d'eau minérale entre deux murs éclabousses de latérite. Colmater sans broncher leur gastro-entérite à coup de smecta, endurer avec une patience de franciscains les moustiques, les rougeurs suspectes sur la peau et les pépins mécaniques du véhicules avec chauffeur loué pour les centaines de kilomètres à parcourir au rythme d'une charrette à bras, les heures de marche sous la pluie dans les épineux et le vert chlorophylle des bosquets, sur des chemins de crête..............ils venaient de passer trois semaines en brousse à recenser la matériel médical disponibles dans les dispensaires les plus reculés du Sud-Kivu. Quelques expressions en swahili auprès de leurs guides aguerris. Se livrer à des jeux de Tetris sur le téléphone avec les enfants des bourgades, à défaut de distribuer des stylos et autres bonbons de colonisateur d'antan. Avec cela une politesse systématique et sans arrière-pensée envers le personnel de l'hôtel, jamais le moindre jugement de valeur émis en sourdine ou le moindre sourire en coin. Ils s'étaient ensemble ou séparément, déjà livrés à ce type de mission au Pérou, au Cambodge, à Madagascar et pour des salaires de poche. Cela allait au-delà de l'ouverture d'esprit. Ces gens étaient nés et appareillés du logiciel d'une humilité éclairée.
Nicolas Fargues